ma botte secrète
Ce dessin était destiné à l’origine à figurer dans l’exposition projetée avec mon collègue François Ruegg, un sculpteur qui travaille la porcelaine. Nous avions décidé, pour cette exposition en duo, d’intervenir chacun avec notre médium sur une pièce réalisée par l’autre.
François projetait notamment une installation composée de plusieurs bottes de pêcheur… Lorsqu’il m’avait montré les photos de son projet, cette botte avait résonné chez moi comme un attribut de pouvoir (voire de dictature) et l’envie de rebondir sur cet aspect avait abouti à ce dessin grand format destiné à être aperçu à travers une porte située en haut d’un escalier dans l’espace d’exposition sur lequel nous travaillions.
Un coup de pied en pleine figure en somme !
Cette exposition n’aura pas lieu. Une succession de malentendus, et des conditions sans cesse revues à la baisse nous ont amenés à laisser tomber ce projet après huit mois de travail.
Allez savoir pourquoi, alors que je travaille généralement d’un seul élan, dans le cas présent j’ai pris mon temps…
Tout mon temps… Comme si je me doutais que la pièce destinée à cette installation ne serait finalement pas présentée.
Ce travail n’est toujours pas terminé à l’heure où j’écris. Toutefois, je l’ai montré lors des portes ouvertes de mon atelier au début du mois de juin.
Ce type de dessin, j’en fais depuis que je suis ado. J’ai toujours rechigné à les présenter hormis dans le cadre de commandes, ou lors de présentations confidentielles.
J’ai toujours soutenu que ce n’était pas mon « vrai travail » et que ce n’était pas ce que je souhaitais présenter comme identité artistique.
Une réticence ancienne, peu compréhensible, même pour moi… jusqu’au jour très récent où j’ai réalisé à l’occasion d’une exposition de mon peintre de père dont le talent me bouleverse depuis que je le connais, que ce genre de dessin signait ma filiation !
Une pudeur, un besoin de me démarquer en tant qu’artiste de l’auteur de mes jours ? Une peur de n’être pas à la hauteur du talent de mon père ? Sans doute un peu de tout ça.
J’ai pris conscience de cette parenté artistique quelques jours avant les portes ouvertes, et décidé d’accepter cette filiation.

la botte, Jeanne Schmid ©Thierry Wenger, Ceux d’en face
Voici donc ce dessin -des pigments cirés traités au pinceau à la tempera-, vu par le regard de Thierry Wenger, photographe brillant rencontré sur les réseaux sociaux, et pour la première fois « dans la vraie vie » lors des ateliers portes ouvertes des artistes de Montreux.